[IYAQCDPDLDDG] Chapitre II

Un instant, il avait cru retrouver la fille de son seigneur parmi les Enfançons. Maintenant que tout espoir était envolé, il retrouvait son calme. A pas lents, il se dirigea vers la porte murée ; il voulait savoir si rien n'était visible à travers cet ajour. En même temps il s'adressa à ses compagnons à voix basse :
- Messires, voulez-vous bien m'accorder la grâce d'entrer en premier dans l'antre de cette merdaille ?
J'ai un compte à régler avec le sieur de Clairac, de ceux qui se payent en pintes de sang. Je dois le mortir d'un coup de dague dans le cœur, mais, avant, j'aimerais m'enquérir auprès de lui de la cache d'icelle Penthésilée qui m'est chère...

Alors qu’Évariste, Guyon et Beppe les rejoignaient, Brionne jeta un œil par le pertuis de la porte murée, mais n’y vit que noir de poix ; ceux qui avaient aménagé ces souterrains n’avaient pas jugé utile de conserver une ouverture assez large pour permettre le passage de qui que ce soit, sans doute parce que la voie était sans issue. Les deux portes de la pièce leur suffisaient manifestement.



Din grimpa rapidement la volée de marches qui le séparait de la porte encore close, pendant que ses compagnons se préparaient rapidement à un combat qui semblait ne plus devoir tarder. Évariste avait en main la seconde lanterne du groupe, et la salle était devenue moins obscure à son arrivée. D’après leurs habits, la plupart des enfants prisonniers étaient de famille modeste ; beaucoup même ne portaient que des guenilles, et Marius ne put que se rendre à l’évidence : il n’y aurait guère de phynance pour qui les rendrait à leurs parents. Seule une fillette d’une dizaine d’années, vêtue d’une robe de velours vert, aurait pu venir d’une maison noble ou bourgeoise. Les autres correspondaient aux pauvres hères qu’avait décrits Gombault la Barrique, des malheureux dont le sort n’intéressait que peu les gens d’armes de Valfons.



Din tâcha de s’assurer que nul ne montait la garde de l’autre côté de la porte en regardant par le trou de la serrure, puis essaya une à une les clefs du trousseau. La porte s’ouvrit finalement sur un couloir aux murs de pierre nue, éclairé par une torche. Après deux toises, le couloir partait sur la gauche, à angle droit. D’après les lumières et le chant plus sonore que jamais, l’échevin Montagnac et ses compains étaient dans la pièce suivante. Sans doute auraient-ils même été assez proches pour entendre Din ouvrir la porte s’ils avaient cessé leurs chants.

Brionne examina le mur autour de la porte : celle-ci pouvait constituer une issue pour l'engeance occupée présentement à chanter son saoul. Il ne voulait pas couper l'ardeur de ses compaings qui montraient grande hastance d'aller estriller le maraud, aussi s'interrompit-il prestement.
- Avant d'aller mortir les houliers ci devant, quelqu'un saurait-il me renseigner plus avant sur le sieur de Clairac ?
Je sais seulement qu'il s'agit d'un homme de riche vesture, la barbe courte, des cheveux blonds et bouclés, portés longs ...et que je compte le faire diner bien tôt aux cotés du dieu Morr ...

L’instant de silence qui suivit la question de Brionne disait assez que ses compagnons n’en savaient pas davantage que lui, et même sans doute moins. Ce n’était après tout qu’en suivant l’échevin Montagnac à travers les rues qu’ils étaient arrivés en l’hôtel de Clairac. Le seul à connaître l’endroit de vue était Évariste, qui avait mené une brève enquête de son côté avant de rejoindre les autres, mais lui-même ne devait pas savoir grand-chose -tout du moins, il ne paraissait pas disposé à en dire plus.

Alors que tous restaient à enserrer la poignée de leur arme sans piper mot, se préparant à ce qui risquait d’être un sanglant combat, les voix de la pièce voisine se troublèrent, hésitèrent un instant. Il y eut comme une bousculade et quelqu’un cria des paroles qui furent couvertes par le chant et par un autre bruit sourd, un bourdonnement désagréable que Din, Marius, Brionne et leurs compains percevaient pour la première fois. Le chant parut sur le point de cesser mais reprit bientôt de l’assurance et se fit de plus en plus fort et rapide, tandis que le bourdonnement gagnait en intensité, jusqu’à donner l’impression d’un vent leur venant souffler aux oneilles. Malgré cette confusion de bruits, ils leur semblait entendre des chocs violents et des cris, comme si la rumeur d’un combat leur parvenait.

"Bon, qu'attendons-nous ? En avant !", fit Din en ouvrant la porte...

D'un même geste, Brionne dégaina épée et main gauche. En quelques pas rapides, il avait rejoint le grand échalas qui venait de franchir la porte.

- Ti seguo, fratello ! Andiamo fino in fondo !

ICI PREND FIN LE CHAPITRE II

En cette dernière nuit du carnaval de Valfons, alors que tout semble dormir dans le quartier noble et qu’une bise glaciale souffle sur les toits, Din, Marius, Brionne et leurs compagnons d’infortune se préparent à un audacieux coup de main. Un dénouement sanglant approche à grands pas.

Que découvriront-ils une fois passé le coin du couloir ? De quel spectacle ignoble leurs yeux seront-ils témoins ? La sinistre affaire de l’hôtel de Clairac touche à sa fin, mais s’ils s’en tirent entiers et vainqueurs, Valfons sera-t-elle pour autant débarrassée de l’infâme corruption qui la gangrène ? Et si Valfons est sauve, le restera-t-elle longtemps en un duché de Gasconnie qui sombre doucement dans l’anarchie la plus noire ? Que manigance l’échevin Montagnac ? Qui est au juste le mystérieux sire Florian de Clairac ? Où diantre finissent les enfants disparus ? À qui va vraiment la loyauté d’Évariste, qui se dit chevalier de Gisoreux mais joue néanmoins du pistolet ? Où sont les neiges d’antan ?

Tout cela, et peut-être un peu plus, sera révélé et découvert en le mirifique chapitre IV.

Je veux passer niveau 2 !