Ô sombre Héraut...

Toison d'or a écrit:

J'ai lu l'article dont tu parles mais l'auteur n'écarte pas non plus la thèse généralement admise*. Il apporte juste une explication supplémentaire quand à l'usage du rabot comme emblème.

Oui je suis d’accord, je le disais moi même dans mon message.

Toison d'or a écrit:

* ou alors j'ai rien compris à l'article

Non non, je pense que tu as raison. Et si j’ai trouvé intéressante cette nouvelle piste, je trouve que l’article n’est globalement pas très bien écrit, il est un peu ardu à lire.
Il faudrait lire l’argumentation de 1ère main pour s’en faire une (meilleure) idée, c’est-à-dire lire Simona Slanicka, mais ça suppose de connaitre l’allemand, ce qui n’est pas mon cas.  

Toison d'or a écrit:

C'est d'ailleurs une autre particularité de ces emblèmes aux moyen âge : l'homme de l'époque y voyait une multitude de sens cachés qui nous échappent plus ou moins désormais.

Tout à fait d’accord, et Niger nous le montre en approfondissant la clé de lecture du rustre bâton contre le civilisé et technique rabot.  

Ce que j'ai aimé dans l’article, c'est que nous avons  parfois tendance (nous au sens large : humains de l’époque moderne, voire post-moderne) à trop « personnaliser » ces grands gouvernants qu’étaient les rois, et ici les ducs de Bourgogne, et donc à forcer le trait sur leur(s) histoire(s) personnelle(s) : rivalités, amours… et leur impact sur le cours de l’histoire. Et c’est normal car en comparaison de nos États contemporains et démocratiques, qui se dotent d’un·e chef·fe par l’élection et pour un mandat limité dans le temps, « l’État c’est eux » (pour reprendre la formule célèbre mais apocryphe).
Pourtant ce sont bien des chefs d’État (bon, la Bourgogne est-elle un véritable État à l’époque de Jean sans Peur, c’est un autre débat !), pour qui le bien commun de leurs territoires (en tout cas l’idée qu’ils s’en font) peut primer sur leur personne. C’est ce que j’ai apprécié dans cet article.

Je note ta remarque, très juste, qu'il faut arriver à s'extraire d'une lecture trop individualisée et personnalisée de ces Etats et Principautés médiévales et modernes. Le fait est qu'un Prince peut régner un ou deux ans et mourir subitement sans que la poussée de force s'interrompe. De même, on peut vivre quelques années sans Prince (captivité, folie, régence, querelle de succession, morts subites de tous les prétendants, l'un après l'autre), sans que tout s'écroule...

Le grand seigneur - ou le roi - est certes un accélérateur de l'Histoire par ses choix, mais il est en quelque sorte au confluent des idéaux, des tendances et des aspirations de son temps. Loin d'être une structure pyramidale fixe, l'exercice du pouvoir en ces temps ressemble plus à une roue en mouvement, dont le centre est le Prince, certes, ou même sa mère ou ses favoris, mais que casse un rayon ou que se fragilise le cercle extérieur, et tout peut céder d'un coup.  

A ces époques-là, le pouvoir est bien moins personnalisé et absolu qu'on ne le dit communément ni centré sur la personne qui l'incarne : il y a des corps constitués puissants qui peuvent faciliter ou entrâver ces choix, et des proches (amis, alliés, rivaux ou ennemis) avec leurs propres aspirations et réseaux, qui peuvent faire de même.

La coutume, les fors, les libertés municipales ou régionales peuvent influer sur les options du Prince et leur application effective ou leur non-application. Les Moyens de communication du temps, les distances et le jeu politique à toutes les échelles jouent également à plein : une annexion décidée et proclamée en XXX1 peut n'être toujours pas réalisée ou effective en XX21 ! L'Etat centralisé n'existe pas.

Même le petit peuple a un grand pouvoir de résistance, ne serait-ce que par l'inertie ou la poussée de fièvre... On peut décider que le français est la langue officielle de tous les actes administratifs au XVIe s. et ne voir venir la chose qu'en 1789 (voire même après).

De mon point de vue d'historien (amateur certes, mais rôdé), on fait trop souvent de la "psychologie historique" là où l'on devrait faire de la "sociologie historique". On se focalise sur un homme alors que l'on devrait se pencher sur les groupes humains en présence, et leurs interrelations. C'est un vieux débat historiographique.

Attention, une trouvaille de choix à signaler !

Comme aucune langue - européenne au moins - ne me fait peur a priori, j'ai tenté une incursion vers l'héraldique finlandaise, à la fois moderne et ancrée dans la plus pure tradition...

Quand on voit ce que réalise l'héraldique française d'aujourd'hui, à peu près moribonde ou ancrée dans des designs erronés et dépassés (ceux des XVIIIe et XIXe, très "bourgeois passés à la savonette à vilains"), je cherchais du neuf. Honnêtement, grâce notamment à des gens comme Michel Pastoureau, il y a un frémissement, un regain de qualité en France, dû à la redécouverte des qualités intrinsèques des codes couleur, des formes et de la signature héraldiques.

On note aussi que l'Europe orientale, sortie du Socialisme, a fait un travail énorme de remise au jour de ses armes, à tous les niveaux (national, régional, local), appuyée par l'Héraldique vivante des pays du Nord de l'Europe. L'héraldique des Pays baltes, notamment, vaut le détour...

Cette perle s'appelle EUROPEANA HERALDICA (https://heraldica.narc.fi). Deux intérêts : une traduction intégrale du finnois en français et anglais notamment ; une interface de recherche simple et intuitive. Le chemin est simple : page d'accueil, "fr" en haut à droite, et "lexique" (soit "ontologie héraldique", soit "recherche").

J'ai vu, au passage, l'existence d'un catalogue actualisé normatif, en allemand, appelé WAPPENBILDERORDNUNG (1996) [pron. plus ou moins : vapën-bildër-ort'nounk, en trois mots]. On peut dire "liste des figures/images héraldiques" pour les non-germanophones. Il n'est pas libre de copyright (donc payant), mais est consultable sur Heraldik.Wiki.de(utschland). Perso, je n'aime pas trop l'interface, lente et peu pratique.

Pour info, les sites en Anglais sont très moyens, du fait que les îles britanniques (et anciens dominions) ont des officines officielles (qu'on qualifierait de publiques) qui ne cherchent pas à partager leurs savoirs au tout venant. Faut bien justifier la paye des hérauts officiels, tiens...

@ Niger: Un grand MERCI!!!!!!!

Le site est très intéressant, je vais m'y plonger avec joie!

Petite remarque de fainéant: tu peux mettre l'adresse du site en "lien" comme cela il nous suffit juste de cliquer dessus et zou, le tour est joué!!!

Attends, est-ce que je vais savoir le faire ?

Héraldique Finlande

Cela fonctionne !

Du coup, un autre très beau site, malheureusement seulement en allemand, mais extrêmement attrayant et bien mis. Vous pouvez tenter une incursion à l'aveugle, notamment sur les deux ou trois rubriques en haut à gauche : Heraldische Praxis (pratique héraldique), Fachbegriffe (argot ? terminologie ? ou qc comme ça) et Besondere Motive (motifs spéciaux)...

Héraldique Allemagne

Ce site vaut tout simplement le détour, sans aucun équivalent sur le net francophone. Bonne fouille. Je peux éventuellement interragir ici-même, au besoin.

Allez mes "enfançons", mes "bacheliers hardis", on s'y remet. Si vous avez parcouru le sujet où Sire Karezeg présente l'un de ses très beaux chevaliers (il travaille très bien, ce garçon), vous aurez remarqué que votre Héraut d'Armes céans a cru bon de lever un lièvre...

Je lance donc, ici même, un "DEFI PORTANT SUR LE BLASONNEMENT DES 6 BANNIERES" que voici :



Toison, dont le destrier s'est emballé, a déjà fait des propositions, qu'il va nous réitérer ici même. Ceci n'est pas un défi à points, mais un entraînement à une lecture d'armes complexes...

J'établis donc que vos propositions soient données ici-même à la vue de tous. Vous pourrez éventuellement les corriger en cours de route (fonction EDIT). Je donnerai mes propre blasonnements le dimanche 19 mars.

Si je vois deux ou trois chevaliers prêts à relever le gant, nous pourrons considérer que nous avons là un EXERCICE préparatoire à un autre "défi de bannières" (qu'il me faudra préparer), avec attribution de points cette fois-ci, disons pour le mois d'AVRIL.

Et pour fêter le printemps, je proposerai une dizaine de bannières avec des fleurs, des plantes ou des éléments naturels...

Après une dure journée de travail, j'ai découvert de message de Niger et n'ai pas résisté : il me fallait relever le défi !
Autant l'avouer tout de suite, je ne crois pas avoir été brillant. Certains de mes blasonnements vont sans doute faire bondir notre maitre es-héraldique, j'ai l'impression de m'être un peu lancé sans filet. Je compte malgré tout sur sa bienveillance pour ne pas en porter ombrage : le jeune padawan que je suis (surtout en héraldique ... pour le reste, c'est moins vrai   ) cherche surtout à progresser, quitte à faire des erreurs sans doute grossières.

Déjà, je pense avoir dit n'importe quoi en affirmant :

Citation :

La faute ne semble pas venir de l'agencement des métaux, cet agencement étant moins strict avec le tiercé

Si on observe les propositions de Niger, les émaux ne s'y touchent jamais, c'est donc une faute, même pour un tiercé. J'ai dû mal interpréter ma fiche : "la règle des contrariétés des couleurs s'applique de façon plus large : une seule des trois pièces doit obligatoirement trancher. Un métal, un émail ou une fourrure peut en toucher un, une autre sans déroger" ...  

Et mes élucubrations de la soirée :

bann.1 :
Tiercé en bande d'azur, d'argent et d'or, la bande chargée de trois demi vols de sable contournés.
bann.2 :
D'or à la bande d'azur resarcelée du même, chargée de trois demi vols d'argent.
bann.3 :
Tiercé en bande  d'argent, d'azur et d'or, la bande chargée de trois demi vols d'argent posés.
bann.4 :
D'or à la bande d'azur chargée de trois demi vols d'argent contournés.
bann.5 :
D'or à la bande d'argent bordée d'azur, chargée de trois demi vols de sable posés.
bann.6 :
D'azur à la bande d'argent resarcelée d'or, chargée de trois demi vols de sable posés.


... Mais ... je serai le seul rescapé à relever le gant face à un défi de maître Niger ?

Niger a écrit:

Et pour fêter le printemps, je proposerai une dizaine de bannières avec des fleurs, des plantes ou des éléments naturels...

Comme c'est un exercice préparatoire, sans points ni classement à la clef, je vais interagir pour que, le 19, je n'ai plus rien à ajouter...

Verdict au 11/03 : les bannières 1, 2, 3 et 6 sont encore mal blasonnées.

Je relève l'utilisation du terme "resarcelé" : c'est bien tenté mais non adéquat ici... Un resarcelé, ce serait une sorte de bordure tranchante, mais à l'intérieur de la bande et qui en ferait tout le pourtour. Ceci dit, il faut en effet utiliser un adjectif spécifique pour traduire que la bordure (diminuée) est décalée d'avec la bande (la croix, le chevron, le pal, la fasce, etc.).

La bannière 4 est presque complète. Je la compte pour correcte, la dernière précision n'étant pas forcément indispensable...

Bannière n°4 : D'or à la bande d'azur, chargée de 3 demi-vols de sable contournés et (posés) à plomb. (ici, je préfère dire "à plomb", car ils devraient être inclinés dans le sens de la bande).

La bannière 5 a un mot de trop, le terme "posé" étant toujours accompagné d'un ou plusieurs autres termes (posé en pal, en fasce, en chevron, à plomb, dans le sens de la bande, etc.). Ceci dit, le reste est nickel. Correct pour moi...

Bannière n°5 : D'or à la bande d'argent, bordée d'azur et chargée de 3 demi-vols de sable (qui sont effectivement posés dans le sens de la bande, mais c'est alors leur positionnement normal : pas besoin d'en rajouter).

@ Niger: Bon, j'ai voulu me remettre à l'héraldique, mais j'avoue que le temps m'a manqué jusqu'à présent...

De plus je dois bien reconnaître que j'ai oublié mes bases et qu'il me faut m'y replonger céans (et séant!!! )

Donc une relecture des trente-une planches éditées (si si ) est de rigueur...

Peut-on rajouter une semaine au délai premier mon bon maistre?

Cela me permettrait de rejoindre dans la lice notre bon Toison, il est indigne de laisser un preux chevalier jouter seul contre son maistre en armes....

Je désespérais justement de trouver des amateurs pour cette petite joute impromptue...

mais la période étant ce qu'elle est, entre la lutte pour joindre les deux bouts, les grèves, les passages en force, les grincements de dents et le bouillonnement de nos concitoyens, nous avons tous bien d'autres chats à fouetter (pauvres bêtes).

"Orduan... bai noski, plazerrekin !" Alors je dis oui, avec plaisir.

Il s'agit donc pour vous de trouver le blasonnement idoine des bannières n°1, 2, 3 et 6 d'ici dimanche prochain, 26 mars.

@ Niger: Ors voici donc venu le temps de relever le gant à mon tour! En espérant proposer une juste lecture des bannières…

Bannière n°1: Tiercé en bande d’or d’argent et d’azur, à la bande chargée de trois demi-vols contournées de sable.

Bannière n°2: D’or à la bande d’azur resarcelée du champ, chargée de trois demi-vols d’argent à plomb.

Bannière n°3: Tiercé en bande d’or, d’azur et d’argent, à la bande chargée de trois demi-vols d’argent posées à senestre.

Bannière n°6: D’azur à la bande d’argent resarcelée d’or, chargée de trois demi-vols de sable posées à senestre.

En espérant ne pas avoir trop perdu depuis notre dernière joute…

J’avoue avoir travaillé dessus une bonne partie de la semaine, me replongeant (avec plaisir) dans les fiches de notre bon maistre d’armes!…

Du coup c’est quand la suite? Dis, notre bon maistre Niger quand c’est? Hein? Quand?

C'est bien mes Braves... Merci de vos efforts, qui me font grand plaisir, mais le verdict a le son d'une hache d'armes s'abattant sur le billot de nos "vies rêvées" ! J'avoue sans honte que décrire ces quelques bannières n'est pas forcément évident, à cause des "écarts à la règle", y compris pour quelqu'un d'entraîné.

Voici donc mes propositions :

Bannière n°1 : "Tiercé en bande d'or, d'argent à trois demi-vols de sable, contournés et à plomb, et d'azur" ou "Tranché d'or et d'azur, à la bande d'argent (brochante) chargée de trois demi-vols de sable contournés et à plomb" ;

Bannière n°2 : "D'or à la bande coticée d'azur, chargée de trois demi-vols d'argent posés à plomb" ;

Bannière n°3 : "Tranché d'or et d'argent, à la bande d'azur chargée de trois demi-vols du second" ou "Tiercé en bande d'or, d'azur à trois demi-vols d'argent (posés dans le sens de la bande) et d'argent".

Bannière n°6 : "D'azur à la bande d'argent, coticée d'or et chargée de 3 demi-vols de sable".

Pour ce qui est des bannières n°2 et 6, je vois plutôt un "coticé" (cf. Heraldica Europeana") qu'un "resarcelé", dans le sens où la bande, qui est la pièce honorable et charge principale de l'écu, est accompagnée de "cotices", de part et d'autre, l'espace intermédiaire étant de la couleur "du champ".
Il existe aussi le terme 'doublement coticé", si la bande est accompagnée de quatre cotices, deux de part et d'autre.

Pour moi, si la "bande" est bordée de deux cotices tranchantes, c'est une "bande bordée" (Bannière n°5)... Si un espace de la couleur du champ s'intercale, on a un "coticé" (Bannières n°2 et 6).

La littérature héraldique n'est pas toujours très claire à ce sujet, mais un "resarcelé" est théoriquement un "orle" placé à l'intérieur de la pièce honorable, qui en fait tout le tour. C'est similaire à la différence entre une "bordure" et un "orle" sur un écu : le "doublement coticé" serait alors le "trêcheur". Pas toujours clair... le diable se cachant dans les détails.

Les Bannières n°1 et n°3 me font beaucoup hésiter... à cause de l'entorse à la règle de" contrariété" et des "demi-vols" placés sur la bande du milieu. D'aucuns y verront des "tiercés", d'autres y verront un "tranché à la bande brochante". Honnêtement, je ne suis pas en mesure de trancher à 100%. C'est le moment où il faut revenir aux règles acceptées.
Pour la n°1, puisque les demi-vols sont posés hors la norme sur la bande au centre, je choisis de décrire un "tiercé en bande", bien que la disposition des émaux me porterait plutôt à voir un "tranché" sur lequel broche une bande. Je dois faire un choix de blasonnement, mais je ne tranche pas.
Pour la n°3, vu que les demi-vols sont posés dans le sens de la bande, ce qui est la norme sur une bande, c'en est bien une, laquelle est donc posée sur un "tranché". Idem : c'est un choix de blasonnement, pas un verdict.

Ainsi, mes amis courageux... la leçon du jour est la suivante :

Essayez toujours de rechercher la clarté et la simplicité dans vos compositions héraldiques et acceptez - que diantre ! - les règles de base. Elles ont fait leurs preuves sur les champs de bataille et les lices. Si vous choisissez de les enfreindre, d'accord, mais en connaissance de cause et en veillant à ce que la description (le blasonnement) puisse en être faite clairement.

Pour la suite, je ferai une annonce en avril, mais j'ai bien envie de vous faire découvrir quelques figures florales et végétales traditionnelles.