Six mois plus tard la trêve durait toujours, Antiope était maintenant une riche cité et Evan et ses compagnons, d’importants seigneurs. Evan avait conquis et reçus les territoires environnants sa cité et sa richesse ne cessait de s’accroître. Il avait investi tout son or et à présent de confortables revenus venaient renflouer ses coffres. Il entraînait son armée et formait ses hommes à un style de combat nouveau ; ils savaient désormais se battre de la même façon que le faisaient les Arabiens. Ils avaient adoptés une tenue blanche et portait une croix rouge sur leurs étoffes. Tous étaient de fervents croyants et leur volonté de servir leur maître et la Dame faisait d’eux de redoutables combattants. Ils étaient désormais connus désormais dans tout le royaume et constituait le principal bras armé d’Antiope et donc de toute la frontière sud.
En ce moment, Evan menait une expédition préventive contre un village orques que l’on avait repéré à dix lieues. Une querelle les agitait et aucun chef n’avait pris le dessus. Evan menait donc une troupe de cent chevaliers à l’attaque du village et prévoyait une rapide victoire. L’armée sortit de la ville sous les prières de la population qui lançaient des fleurs aux guerriers. Les étendards dressés, la troupe partit ; hélas pour eux aucun ne se doutait que la plupart ne reverraient peut-être jamais leurs familles…
Au bout de quelques heures de voyage ils s’arrêtèrent pour abreuver leurs chevaux et prendre du repos ; l’attaque se fera de nuit car la surprise devait être totale. Chacun priait en silence, il demandait à la Dame de leur donner force et courage, qu’ils ne puissent reculer devant l’adversité et l’horreur des combats. Evan songeait lui aussi, il était confiant en la bravoure de ses hommes et il ne voyait pas comment de si braves guerriers pourraient perdre une bataille.
Au milieu de la nuit ils se levèrent et éperonnèrent leurs destriers. L’armée partit sans bruit, seul le faible bruit des sabots sur le sable venait troubler le silence ambiant. Très vite les lumières du campement orques furent en vue et Evan ordonna de s’arrêter. Il scinda son armée en trois et expliqua son stratagème à ses barons, ils devraient attaquer de tous côtés pour couper la retraite aux orques. Puis, quand tout fut prêt il s’empara d’un lourd cor d’ivoire et souffla de toutes ses forces. Le bruit se répercuta dans les dunes et s’amplifia dans une cacophonie ressemblant aux bruits que ferait un millier d’hommes. Les chevaliers hurlèrent et chargèrent le campement. Les orques s’amassaient déjà mais l’impact fût terrible. Ils périrent par dizaines et la victoire se dessinait déjà. Mais soudain des lueurs se firent voir sur une dune à la gauche d’Evan, des centaines de torches! Des trompettes retentirent et ces nouveaux ennemis les chargèrent sans hésiter. Organisant sa compagnie, Evan se préparait à faire face à ce nouvel ennemi incongru. Mais au même moment les premières lueurs de l’aube pointèrent à l’horizon. Alors les chevaliers virent de quoi il en retournait: des centaines d’Arabiens vêtus de noir et rouge les attaquaient et il en venait toujours plus. Voyant le piège dans lequel il s’était fourré il chargea sans hésiter, espérant traverser les lignes pour repartir vers Antiope. Mais curieusement les Arabiens s’écartèrent et les laissèrent passer. Tranchant quelques têtes, Evan se prit à espérer. Mais encore une fois la stratégie de l’adversaire l’avait pris au dépourvu; des nuées de flèches leur furent envoyées et ils tombèrent les un après les autres, Evan lui-même en reçut une qui lui perfora l’épaule. Mais il se cramponna à ses rênes et donna un coup d’éperon dans les flancs de son destrier. Celui-ci bondit, laissant une longue traînée de poussière derrière lui. Il savait désormais que rien ne pouvait l’arrêter ; aucun homme d’ici ne connaissait la vraie valeur des destriers Bretonniens. Les Arabiens ne purent cacher leur stupéfaction quand ils virent cet incroyable animal planter une telle accélération qui laissa tout les cavaliers ennemis de marbre. Lui et les quelques hommes qui lui restaient fondirent et traversèrent les lignes ennemies avant que celles-ci ne purent se refermer sur eux. Seul comptait à présent d’avertir les population du royaume de l’immense péril dans lequel ils se trouvaient tous : hommes, femmes et enfants.
Il galopait à présent plus légèrement. Devant une telle démonstration de rapidité et d’endurance, aucun Aabien ne songerait à les poursuivre. Arrivés à Antiope, ils se précipitèrent au point d’eau le plus proche, sous peine de mourir d’épuisement. Puis, sans prendre la peine de se reposer, Evan tint conseils avec ses généraux. Il leur expliqua en détail ce qui s’était produit la nuit précédente. L’attaque du campement et la venue des Aabiens, que l’on croyait redevenus pacifiques. La peur se lisait dans leur regard, la peur de voir se réduire en cendre tout ce qu’ils s’étaient échinés à construire. Il était question d’une armée constituée de milliers d’hommes dont personne ne savait d’où ils venaient, alors que Antiope avait vu disparaître le quart de son ost. Il fut décidé de quérir de l’aide à Kelerak avant que Antiope ne soit submergée, et avec elle toute la frontière sud.