En ce jour de Pâques, date parfaite pour insuffler un peu de vie dans une section moribonde, je vous propose un rapport de bataille particulièrement adapté. J’ai nommé :
La Chasse aux Œufs !
Les règles originales de ce scénario d’escarmouche sont issues du supplément
Skirmish (pp. 44-45), paru en 2002, mais on fait l’objet de plusieurs adaptations de ma part pour rendre la partie plus intéressante et augmenter sa difficulté. Celles-ci sont détaillées dans le spoiler ci-dessous afin de ne pas alourdir le reste du rapport.
- Spoiler:
La Chasse aux Œufs oppose deux forces (voire d’avantage) : les assaillants sont des pilleurs de nid qui vont tenter d’emporter les œufs, tandis que ces derniers sont défendus par leurs monstrueux parents.
Les poussins
Dans le nid se trouvent également deux poussins affamés qui disposent du profil suivant :
Poussin : M - | CC 2 | CT - | F 3 | E 3| PV - | I 2 | A 1 | Cd 4
Les poussins n'ont pas de valeur de PV, car les pilleurs ne prendront jamais le risque de les tuer. Un pilleur qui touche et blesse un poussin se contente de le repousser, le rendant inoffensif pour ce tour.
S'il n'est pas engagé au corps à corps, un poussin attaquera automatiquement une figurine qui entre en contact avec le nid. S'il est déjà engagé au corps à corps par au moins une figurine ennemie, il ne prêtera aucune attention aux autres pilleurs.
Les poussins ne retiennent pas au corps à corps les figurines qu’ils attaquent. Un pilleur peut donc tout à fait les ignorer pour jeter son dévolu sur un œuf. Cependant, en baissant ainsi sa garde, il subira une touche automatique par poussin non engagé au corps à corps.
Un pilleur touché et blessé par un poussin, même s'il ne perd pas de PV, est incapable de se saisir d'un œuf durant ce tour.
Les œufs
Il y en a trois. N’importe quelle figurine peut en ramasser un à partir du moment où elle entre en contact avec le nid ou avec un œuf qui en a déjà été sorti.
L'action de ramassage s’effectue durant la phase de mouvement et entraîne la perte de tout mouvement restant.
Une figurine ne peut porter qu'un œuf à la fois et est alors incapable de se déplacer en marche forcée. Cependant, si deux figurines combinent leurs efforts (en étant chacune en contact socle à socle avec l'œuf), cette restriction est levée. Courir avec un œuf géant dans les bras présente tout de même des risques ; aussi le joueur qui prend cette décision doit-il lancer 1D6 avant d’entamer son déplacement. Sur un résultat de 5 ou 6, les porteurs trébuchent à la fin de leur mouvement ordinaire et s’arrêtent. L’œuf tombe et se brise ; il est définitivement perdu et retiré du jeu. Dès qu’un œuf est brisé, les parents deviennent frénétiques et ne perdront jamais leur frénésie, même s’ils sont vaincus au corps à corps.
Une figurine qui porte un œuf ne peut ni tirer ni lancer un sort. Si elle déclare une charge, elle dépose l'œuf là où elle se trouve avant de réaliser son mouvement. Si elle reçoit une charge, elle pose l'œuf à ses pieds le temps de se battre. Compte tenu de son encombrement, elle ne peut que maintenir sa position en réaction à cette charge.
Les parents
Dès qu'un pilleur est entré en contact avec le nid, les cris des petits retentissent et leur mère entre par le centre d’un bord de table déterminé aléatoirement. Le père est susceptible d’arriver lors d’un tour ultérieur selon les mêmes modalités. Au début de chaque tour des aigles qui suit celui durant lequel la mère a fait son entrée, lancez 1D6 : le père surgit sur un résultat de 5+ au premier tour, 4+ au second, 3+ au troisième, 2+ au quatrième ou automatiquement au cinquième. Les monstres agissent indépendamment et se déplacent par défaut de 1D6 pas par tour en direction de la figurine ennemie la plus proche. Tant qu’un assaillant est en possession d’un œuf, leur distance de déplacement passe à 2D6 pas en direction du porteur le plus proche. Un monstre dont le mouvement l’amène en contact socle à socle avec une figurine ennemie est considéré comme l’ayant chargée.
Objectifs
Les assaillants cherchent à s’emparer d’un maximum d’œufs en y laissant le moins d’hommes possible. Les défenseurs, au contraire, cherchent à éliminer la menace à tout prix et à protéger leurs rejetons.
Chaque camp engrange (ou perd) des points dans les situations suivantes :
- Un œuf est sorti par un bord de table : 3 points pour l’assaillant.
- Un œuf est brisé : 1 point soustrait au score de l’assaillant.
- Un pilleur est tué : 1 point pour le défenseur (2 points s’il s’agit du commandant du corps expéditionnaire).
Le vainqueur est logiquement celui qui totalise le plus grand nombre de points à la fin de la partie.
Notes techniques
- Durée : la partie continue jusqu’à ce que le dernier assaillant sorte du terrain ou se fasse tuer.
- Dérogations aux règles d’escarmouche : une figurine qui perd son dernier PV est immédiatement éliminée et les tests de déroute sont ignorés.
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—
J’ai faim !—
Et moi j’ai soif !—
J’ai mal aux pieds !—
C’est encore loin ?—
Fermez-la !, aboya le capitaine Baldwin, excédé par les jérémiades de sa petite troupe.
Cela faisait presque une demi-journée que l’intendant d’Aurevallis avait quitté le domaine sur ordre de son seigneur pour s’enfoncer dans des régions quasi inexplorées de la forêt d’Arden. Sept hommes parmi les moins fiables et les plus stupides de toute la seigneurie l’accompagnaient avec une mauvaise volonté affichée.
—
Et p’is d’abord, pourquoi qu’il lui faut des œufs d’aigle au s’gneur ? L’a pas assez d’poules ?, demanda l’un d’eux en forçant l’arrêt.
—
Tu crois peut-être qu’il me détaille ses plans avant de m’envoyer en mission, sinistre abruti, rétorqua un Baldwin passablement irrité.
Il donne les ordres, on obéit. C’est comme ça que ça marche.L’envie d’en assommer un ou deux pour faire bonne mesure traversa l’esprit du fidèle bras droit de Mictlantecuhtli, mais il était bien assez futé pour savoir qu’ils ne seraient pas trop de huit pour cette dangereuse mission.
—
Moi j’vous dis qu’c’est d’la folie, poursuivit le frondeur.
C’te bêtes là, j’les ai d’jà vues mettre en pièces des brav’ gars pour les avaler jusqu’aux os. Je l’sens mal c’t’affaire!Les murmures d’approbation se multipliaient au sein du petit groupe. Baldwin comprit qu’il devait mettre un terme à cette discussion s’il ne voulait pas que la situation lui échappe et tourne en mutinerie.
—
Vous préférez peut-être rentrer au domaine et annoncer au seigneur que vous ne « sentez » pas la tâche qu’il vous a confiée ?Il n’était même pas nécessaire d’élever la voix. A la seule perspective d’un tête à tête avec l’homme le plus cruel et vindicatif de tous les duchés alentours, un silence apeuré frappa jusqu’aux plus révoltés. Baldwin esquissa un sourire en coin et ne jugea pas nécessaire d’ajouter un mot. Il reprit le sentier qu’ils arpentaient depuis plusieurs heures et tous le suivirent sans discuter.
Bientôt, ils débouchèrent dans une région de la forêt qu’une colline dénudée dominait de sa masse imposante. En son sommet se devinait un entrelacs de branches qui ne pouvait être que le nid des aigles géants, mais un long chemin en terrain découvert attendait encore les aventuriers inconscients qui seraient tentés par l’escalade. Accroupi entre les derniers arbres sous lesquels lui et ses hommes avaient trouvé refuge, Baldwin donna le signal de départ :
—
C’est parti ! L’endroit à l’air désert, mais restez sur vos gardes. Vous connaissez mes instructions.Sept grognements résignés lui répondirent.
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Forces en présence :a)
Défenseurs :- Deux grands aigles (100 points).
- Deux poussins, Caliméro et Priscilla.
b)
Assaillants :- Baldwin de Vertval : intendant commandant l’expédition (arme de base, armure légère et bouclier enchanté ; 60 points).
- Les
« volontaires désignés d’Artenois » : trois hommes d’arme (arme de base, arme d’hast, armure légère et bouclier ; 15 points).
- Les
« gardes-chasse bigleux » : quatre archers (arme de base et arc long ; 24 points).
Le terrain :Le champ de bataille est une surface carrée de 48 pas de côté. Son centre est occupé par une imposante colline à deux niveaux, au sommet de laquelle les aigles ont établi leur nid. Le niveau inférieur de la colline est encombré sur deux côtés : par des rochers au sud et par des amas de branches au nord. Ces deux zones constituent des terrains infranchissables que devront contourner les assaillants. Enfin, les angles nord-ouest et sud-est accueillent des bois. Ce sont des terrains difficiles pour les créatures volantes, qui doivent donc diviser leur mouvement par deux quand elles les traversent. Les figurines à pied y évoluent par contre sans restriction.
Déploiement :L’expédition d’Aurevallis se déploie en deux groupes séparés de quelques pas. Baldwin de Vertval prend la tête du flanc gauche, accompagné d’un homme d’arme et de deux archers. Le flanc droit se compose de deux autres hommes d’arme et de deux archers.
NB : A cette échelle, les symboles qui identifient les personnages sont presque invisibles. Pour information, sachez donc que Baldwin est représenté par le carré bordé d’or et frappé d’une étoile, que les hommes d’armes portent une petite tache blanche informe et que les archers semblent avoir un carré presque rouge uni.
Les poussins roupillent dans leur nid et les parents sont en chasse hors des limites du terrain.
La bataille :Tours 1 à 3 d’Aurevallis
Durant ces tours préparatoires, les deux moitiés de l’expédition se lancent à l’assaut de la colline dans un mouvement synchronisé de tenaille. Rien ne s’oppose encore à leur avancée et les aigles n’ont pas vraiment de tour jusqu’à présent.
Tour 4 d’Aurevallis
Bien qu’un homme d’arme du groupe de droite soit à portée pour attaquer le nid, il s’arrête à une distance respectable afin d’attendre les renforts et postposer l’arrivée de la mère. Baldwin a bien fait comprendre à ses hommes que seule une attaque coordonnée sur le nid serait à même de minimiser les risques. Aux deux extrémités de la colonne, un archer se stationne sur le niveau inférieur de la colline afin de couvrir ses compagnons.
Tour 5 d’Aurevallis
L’assaut général est lancé ! Les poussins sont chargés par des archers, laissant le champ libre à Baldwin et deux hommes d’arme pour s’emparer des oeufs. Le point d’entrée des parents est une grande (et dangereuse) inconnue. Aussi, afin de permettre à au moins un porteur de fuir sans encombre, les trois se répartissent équitablement autour du nid.
Durant la phase de corps à corps, Calimero est repoussé par son adversaire tandis que Priscilla tient tête au sien sans toutefois parvenir à le blesser.
Au terme de cette phase, la mère fait sa grande entrée par le bord nord.
« C’est trop inzuuuuuste ! »Cri supposément poussé par un certain poussin durant l’assaut.
L'étau se resserre
Tour 5 des aigles
La mère s’élance de sept pas vers l’homme d’arme le plus proche et atteint ainsi le pied de la colline.
Tour 6 d’Aurevallis
Baldwin s’éloigne sans tarder vers le sud-ouest avec son œuf. Un homme d’arme le rejoint au terme de son mouvement afin qu’ils puissent se déplacer en marche forcée au prochain tour. Un autre porteur s’en va vers le sud-est et le dernier – qui vient de devenir la cible de
« maman » - part vers le nord-est afin d’écarter le monstre des autres objectifs en mouvement.
Les deux archers qui engageaient les poussins s’éloignent du nid et se joignent aux autres pour un tir groupé. Un seul tir parvient à toucher, mais la force du projectile est insuffisante face à l’endurance du monstre. Celui-ci s’en tire sans une égratignure.
Tour 6 des aigles
Le grand aigle s’avance de six pas de plus en direction de l’homme d’arme, ce qui l’amène au pied du niveau supérieur. Le père reste heureusement invisible pour le moment, accordant d’avantage de temps aux pilleurs pour s’éloigner.
Tour 7 d’Aurevallis
Baldwin et son comparse dévalent les flancs de la colline en évitant de casser leur œuf. L’homme d’arme poursuit sa route vers le sud-est et atteint le niveau intermédiaire, ce qui est également le cas pour celui que l’aigle poursuit.
Gêné par le relief, un archer a une ligne de vue bloquée et ne peut prendre l’aigle pour cible. Les trois autres lui envoient une salve, mais seule une flèche l’atteint, sans pour autant parvenir à le blesser.
Ca commence à sentir le roussi !
Tour 7 des aigles
La mère se déplace de sept pas, ce qui lui permet de charger un homme d’arme terrifié. Le père ne donne toujours aucun signe de vie, au grand soulagement de l’expédition.
Les deux attaques du grand aigle touchent et blessent. Sa malheureuse victime ne parvenant à sauvegarder de justesse qu’une seule blessure, c’est sous des serres cruelles que le soldat rend son dernier soupir.
Il y a des jours comme ça où l'on ne devrait pas quitter son lit ...
Tour 8 d’Aurevallis Au sud-ouest de la colline, un ballet se met en place : après avoir fait en sorte de l’éloigner le plus vite possible, Baldwin laisse son œuf à l’homme d’arme qui l’accompagnait et remonte au sommet de la colline à pleine vitesse. Il est le seul à avoir la moindre chance face à un grand aigle, aussi se prépare-t-il au combat.
« Par le Très Saint Slip du Roy, j’entends déjà un de nos hommes hurler à la mort ! Prends ce maudit œuf et tire-toi d’ici, j’ai mieux à faire que t’aider à le porter ! »Baldwin de Vertval à son subordonné.
L’homme d’arme s’éloigne donc en direction du bord du terrain et l’archer qui était demeuré en vigile vient se positionner entre lui et le centre du bord de table. Il sera ainsi à même d’encaisser la charge du père si le second aigle devait faire son entrée par ce côté. Un autre archer contourne le nid et le dernier homme d’arme rejoint le pied de la colline pour partir en quête du couvert des bois au sud-est.
Les trois archers prennent à nouveau la mère pour cible, mais leur unique touche ne parvient toujours pas à la blesser.
« Bande d’incapables ! Vous rateriez un démon majeur dans des latrines ! »Baldwin de Vertval émettant une évaluation objective des prestations de ses hommes.
Tour 8 des aigles Dans un cri de rage à percer les tympans, le père débarque de l’est ! Encouragée par ce renfort, la mère réalise un gigantesque bond de douze pas qui aurait pu l’amener au contact du voleur qu'elle pourchasse, mais rencontre avant cela l’archer qui offre à son compagnon le rempart de son corps.
Une seule attaque du rapace parvient à blesser, mais il n’en faut pas plus pour venir à bout des oripeaux qui tenaient lieu d’armure à cet homme. Dans un râle d’agonie, son corps déchiqueté s’affale au sol.
« Et encore un en moins ! Bon sang, le prochain qui s’avise de trépasser, je repasse derrière pour massacrer sa carcasse ! »Baldwin de Vertval ou l’art de la motivation.
Tour 9 d’Aurevallis La situation devient compliquée : deux des œufs se trouvent en plein dans la zone d’action des aigles et un seul est en sûreté. Son porteur poursuit sa marche vers l’ouest et devrait pouvoir le mettre à l’abri sans attirer l’attention. Son compagnon - qui porte le second œuf encore en possession des assaillants - progresse aussi vite qu’il le peut vers le couvert du bois en espérant ainsi ralentir ses poursuivants. Baldwin s’avance pour obtenir une ligne de vue sur la mère, aidé en cela par un second archer. Des deux autres tireurs encore vivants, l’un se rue courageusement devant la mère pour gagner un peu de temps et le second quitte son rôle d’escorte inutile pour prêter main forte à ses camarades.
Baldwin réussit son tir, mais ne parvient pas à blesser. L’archer, lui, échoue lamentablement à atteindre sa cible.
Tour 9 des aigles Comme l’on pouvait s’y attendre, la mère s’élance vers le porteur d’œuf et engage l’archer au passage. Le père couvre pour sa part l’effrayante distance de neuf pas, ce qui le rapproche très dangereusement de sa cible.
Au corps à corps, la mère parvient à faire passer une attaque, ce qui est suffisant pour envoyer le pauvre archer sucer les pissenlits par la racine.
« Rogntudjû ! Tu l’auras voulu ! »Baldwin de Vertval, quelques instants avant de soulager ses nerfs sur une dépouille sanglante.
Tour 10 d’Aurevallis Les choses risquent de tourner au vinaigre. Un œuf est abandonné, un autre en danger imminent, et le corps expéditionnaire est presque réduit de moitié. Face à la force des aigles, toute tentative de s’interposer semble vouée à l’échec et ne fait gagner qu’un peu de temps. L’homme d’arme pourchassé tiendra donc lieu d’appas. Puisqu’il n’a qu’une chance infime de quitter le terrain en vie, il sera plus utile pour attirer les aigles le plus loin possible de l’œuf restant. Les survivants s’en empareront alors avant de déguerpir à toute vitesse. C’est ainsi qu’il poursuit sa marche vers le bois, aussi vite que ses jambes peuvent le porter, tandis que Baldwin et les deux derniers hommes disponibles se dirigent vers l’œuf laissé sans surveillance. Loin à l’ouest, heureusement oublié de tous, un soldat solitaire progresse sans crainte vers la sortie.
Les déplacements en marches forcées de ce tour ne laissent à personne l’occasion de tirer.
Ce qui n’est pas une grande perte …Tour 10 des aigles Le couple progresse vers sa future victime, mais ne parvient pas encore à la rattraper. Le prochain tour s’avèrera décisif.
Run (to the) Forest ! Run ! Tour 11 d’Aurevallis Puisant dans ses dernières forces, le fuyard se jette sous le couvert des arbres, tandis que son homologue bien mieux loti franchi enfin la limite du terrain. Baldwin et un archer fondent sur le troisième œuf pour s’en saisir, tandis que l’archer restant s’avance pour couvrir leurs arrières.
Tour 11 des aigles Regrettable erreur d’appréciation pour les bretonniens : la mère se trouve un petit pas plus près de l’œuf de Baldwin que de celui qui prend la route du sud ! Elle fait donc volte face, mais ne progresse fort heureusement que de deux misérables pas (ouf !). Le père continue de poursuivre l’autre voleur, mais les branches des arbres l’empêchent de lui mettre la griffe dessus. Il s’en est fallu de peu.
Tour 12 d’Aurevallis Baldwin et son assistant prennent le risque de courir avec l’œuf dans les bras et s’en tirent sans casse. Ils installent ainsi une distance confortable entre la mère et eux. Le dernier homme aux mains libres poursuit sa course pour intercepter cette dernière, quitte à prendre le risque de la charger au prochain tour. Dans son bois, le porteur solitaire n’est plus qu’à quelques pas de la victoire.
Tour 12 des aigles La mère continue sur sa lancée mais, probablement épuisée par cette longue chasse, peine à couvrir une distance de cinq pas. Son compagnon est bien plus frais et fond impitoyablement sur sa proie.
Dans cet inextricable fouillis de branches, l’aigle échoue à porter correctement ses coups, ce qui offre un répit à son adversaire. Retournement incroyable, le valeureux soldat parvient non seulement à toucher mais également à blesser l’aigle géant, vengeant ses camarades tombés ! Ce petit point gagné suffit à contrer la puissance d’unité supérieure de l’adversaire, mais pas l’attaque de dos qui lui impose un test de panique avec un malus de 2 … qu’il surmonte en obtenant un surprenant 3 ! Les deux adversaires restent par conséquent engagés pour le tour suivant.
« Tudiou ! Attendez voir que j’raconte ça à ma bonne femme ! »Un combattant anonyme.
Tour 13 d’Aurevallis La bataille étant très serrée, le duo de Baldwin prend à nouveau le risque de courir, et cela s’avère payant. Les deux hommes couvrent ensemble une nouvelle distance de 8 pas, ce qui les met à portée pour une sortie de table au prochain tour. L’archer qui devait protéger leur retraite ne sert visiblement plus à rien, c’est pourquoi il prend la tangente et évite d’offrir des points supplémentaires à l’adversaire.
Malgré un début très impressionnant, le face à face dans le bois du sud ne pouvait pas s’éterniser. Le bretonnien échoue à toucher le rapace géant, qui ne parvient pas à le blesser en retour. Soumis une fois encore à un test de panique, cette fois avec un malus de 3, le piéton ne peut encaisser le choc. Il abandonne son œuf et prend la fuite jusqu’à sortir du champ de bataille.
Tour 13 des aigles Le père reporte son attention sur les derniers hommes encore présents aux alentours du nid, mais s’empêtre tellement dans les branches qu’il fait quasiment du sur-place dans les bois (1 pas). La mère réalise une très respectable avancée, malgré tout insuffisante pour rattraper Baldwin et son chargement.
Tour 14 d’Aurevallis Les derniers hommes présents sur le territoire des aigles quittent la table, emportant avec eux un œuf supplémentaire. Fin de la bataille et victoire des Aurevallois par six points contre trois !
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Le seigneur Mictlantecuhtli profitait de cette agréable après-midi ensoleillée pour se détendre à l’ombre des frondaisons d’un chêne centenaire. Confortablement assis sur une cathèdre rembourrée de cousins cramoisis, ses jambes étendues reposaient sur un gueux à quatre pattes qui lui tenait lieu de tabouret. Accaparé par la lecture d’un ouvrage qui semblait le passionner, il ne prêtait quasiment aucune attention à l’activité foisonnante qui se déroulait tout autour de lui. Du plus jeune au plus âgé, tous les villageois mettaient la main à la pâte pour préparer la grande fête de printemps.
Fendant soudainement la foule affairée, le capitaine Baldwin vint se camper auprès de son maître et attira son attention par un discret toussotement.
—
De retour Baldwin, lâcha Mictlantecuhtli sans même quitter sa lecture d’un œil.
—
Oui monseigneur, à l’instant. C’est fait, nous avons deux œufs.—
Félicitations capitaine, c’est juste ce qu’il me fallait. Tout s’est donc passé sans accroc ?—
Si on veut. Quatre hommes sont morts. Trois sur place et un après.—
Après ?, interrogea le seigneur des lieux en levant enfin la tête.
—
Je l’ai fait exécuter, monseigneur. Un lâche doublé d’un fieffé menteur. Il prétendait avoir tenu tête à un grand aigle jusqu’à ce qu’il soit contraint à la fuite. Ce faisant, il a abandonné le troisième œuf que nous aurions pu vous rapporter. Je l’ai bien sûr fait écarteler par les quatre escargots géants que son excellence le Lord del Insula a eu l’obligeance de nous prêter.—
Parfait, parfait, répondit distraitement Mictlantecuhtli qui était déjà retourné à son livre.
Le jour où nous verrons un gueux faire montre de courage, j’écrirai des essais humanistes.—
La Dame nous en préserve ! réagit Baldwin avec une épouvante non feinte.
Bien qu’il demeura planté là tel un piquet, le sire d’Aurevallis sembla presque instantanément oublier la présence de son bras droit. Après plusieurs longues minutes d’une attente inconfortable, ce dernier résolu de raviver le feu de la conversation :
—
Euh, monseigneur, si je puis me permettre …—
Hmmmm ?—
Que faut-il faire de ces œufs ?—
Simple : faites les peindre avec de jolies décorations puis envoyez l'un à Penthésilée de Gransette et l'autre à Constance de Mélinor, avec mes compliments.—
Je m’y emploie sur le champ. Baldwin s’était éloigné de quelques pas en direction du château lorsque la voix de son maître retentit à nouveau derrière lui :
—
Oh et, Baldwin, commencez donc par les cuire dix minutes dans une marmite d’eau bouillante. On n’est jamais trop prudent … Sur un hochement de tête, l’officier se remit en route pour traverser la foule des villageois en fête qui dressaient les tables et tendaient de multiples guirlandes de fleurs multicolores. Des foyers improvisés s’élevaient les odeurs alléchantes d’une cuisine exceptionnellement raffinée et tous les visages arboraient les larges sourires rayonnants de circonstance. Tous sauf trois. Trois faciès aux traits tirés, appartenant à des hommes fourbus, maculés de poussière et de brindilles, qui hélèrent l’intendant à son passage :
—
Hep, cap’taine ! On a pas mérité une ‘tite rallonge sur not' solde pour les risqu’ qu’on a pris ?—
La plus belle récompense à laquelle vous puissiez prétendre est le contentement de votre seigneur et maître. Soyez heureux, vous l’avez.Si la tête que tirèrent alors les rescapés de l’expédition s’apparentait de près ou de loin à de la joie, personne n’aurait pu imaginer celle de leurs mauvais jours. Baldwin allait les quitter sans plus de cérémonie quand l’un d’eux le retint par une question :
—
Dites, cap’taine, y vous a au moins dit pou’quoi y nous a pas donné des armes plus costaudes pour combat' ces monstr’ ? Chais pas moi. Une 'tite baliste par exemp’, ça aurait pas été du luxe. —
Oh, c'est très simple, répondit Baldwin tandis qu’il reprenait sa route,
le seigneur ne souhaite pas que nous compromettions la collecte de l'an prochain en supprimant les parents.—
La collecte de l'an proch... !?Derrière lui, Baldwin entendit distinctement le bruit étouffé de trois hommes tombant à la renverse.
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Le mot de la fin :Pour la petite histoire, j’avais prévu de livrer cette bataille et d’en publier le rapport à l’occasion de Pâques 2018.
Mais bon, vous savez ce que c’est : des pièces à peindre, des décors à réaliser, un texte à rédiger … Tout ça prend du temps et mon rythme Lordesque
n’arrange rien à l’affaire.
Sur ce, et en espérant que la lecture vous aura plu :
JOYEUSES PÂQUES TOUT LE MONDE !