[Danse avec les loups] L'expédition

Le lutin avança en titubant dans la faible clarté prodiguée par l'éclat de Morrslieb à travers les branchages, et tous purent reconnaître... Le jeune Justin Chausson, complètement terrifié

"Au secoul ! Y sont derrière moi, y z'arrivent !"

Des formes sombres de taille humaine sortirent d'entre les arbres, en claudiquant lentement et en poussant des râles rauques, comme des râclements de gorge ou des bâillements graves.

Tombé tête la première à côté de l'enfant, Géraud sentit la rage monter en lui. La bave aux lèvres, il se releva lentement et, réalisant qu'il avait été envoyé aux côtés du "lutin" qu'il voyait du coin de l'oeil, se mit à trembler de tout son long. Il tuerait Arnould pour ça, il ne fallait pas en douter, mais il fallait pour l'heure sortir de ce mauvais pas. Empoignant fermement sa vieille pelle, il se retourna vivement et assomma l'enfant d'un bon coup derrière le crâne, à la consternation générale.
Satisfait, Géraud se redressa et sourit. Ce fut alors qu'il remarqua des sons etranges dans son dos. Hélas, il était trop tard pour fuir et ses jambes refusaient à présent de bouger.
Par sa fourberie insensée, Arnould venait sûrement d'avoir sa peau. Le fossoyeur n'avait plus pour seule consolation que sa victoire sur cet infâme lutin mangeur d'hommes.

Bien. Arnould avait peut-être fait une légère erreur dans son appréciation des événements. Pauvre Justin. Enfin. Avec un peu de chance, Géraud serait quand même mangé.

L’aubergiste empoigna son fidèle maillet et recula de quelques pas, juste assez pour se fondre au sein du groupe, attendant pour agir une idée brillante de la part de Robert. La situation lui inspirait en effet la plus grande méfiance. Ces créatures pouvaient être des revenants, des lutins, des démons des bois, des elfes, des membres d’une association de défense des animaux venus venger la mort de Beurk, des goules sanguinaires ou Shallya savait quels monstres ! Peut-être même l'apparition de Justin était-elle un piège, peut-être était-il possédé, à moins que ce ne fût qu’un farfadet ayant pris les traits du jeune garçon après l’avoir décervelé avec supplice et arrachement des genoux ?

Voyant son neveu sortir des ténèbres, Robert Chausson oublia sa peur et couru vers lui, il n'eut pas le temps d'empêcher Géraud d'assommer le pauvre gosse qui tomba inanimé dans la neige. Il se pencha vers le gamin, regardant s'il vivait encore. Une légère vapeur sortait de son nez qui lui indiqua qu'il respirait toujours. Le soulevant, il le déposa à proximité du feu et se retourna ivre de colère vers Géraud. Il se tenait prêt à l'embrocher lorsque les formes qui suivaient Justin firent leur entrée dans la clairière. (à toi Dangorn )

Cinq manants s'avancèrent dans la clairière, avec une étrange lenteur, comme s'ils traînaient des pieds. Ils levèrent leurs bras vers les Dantarayens et ces derniers purent remarquer l'aspect décharnés de leurs doigts. Ces doigts avaient également visiblement servi à creuser dans de la terre ou pire et n'avaient pas été lavés depuis plusieurs jours, car ils étaient affreusement sales et leurs ongles noircis et à moitié cassés n'avaient pas été coupés depuis des lustes.

Les yeux des nouveaux venus avaient l'air comme morts, ils ne regardaient pas dans la bonne direction.

Géraud se retourna lentement et fut stupéfait de voir ce qui se présentait devant lui. Il bafouilla en tripotant nerveusement le manche de sa pelle.

« M-m-m-mo... les molts ! Les molts sont reviendus poul manger les vifs ! Paldonne-nous le Moll ! Paldonne à cheux qui chont poinct encole des tiens et qui voulions poinct trop y aller déjà.»

Il éleva son arme devant sa figure et commença à reculer lentement en direction des autres Dantaryens.

« Je l'avions bin diche que les Huch'lipiens y chavaient pôs enteller les colps.»

Arnould fit un élégant bond de côté quand Géraud s’approcha. Qu’un autre reçoive des coups de pelle, cette fois-ci.

« Ceusses d’Husselype, d’par ma merdre ! » grogna-t-il en se tournant vers le vieux fossoyeur. « Tu parles ! C’est les tudés d’cheu nous qu’t’as pas enterrés comment qu’y faut, outre à pisse ! peigne-cul ! on d’vrait t’couper les oneilles ! »

Arnould, tremblant de peur, serra son maillet contre lui et murmura une prière à l’amulette qu’il portait autour du cou, un lapin vert de chiffon symbolisant le dieu Taal : « Si qu’tu m’sauves de cette merdre, j’irons verser un biau tonneau d’vin vieux comme-z-une offrande dans l’Marais aux Fées ousque c’est ton sanctuaire, je l’jure de par mes oneilles. »

Géraud regarda l'Arnould avec un certain mépris, chose qu'il avait rarement eu l'occasion de faire au cours de son existence.

« Parche que t'en r'counoussois zun d'chez nous dans le lot, testecouille ? Des luchtres qu'le Giraud il entelle les molts et y peut te dile qu'y en a pôs des not' dans l'paquette. Eh puis chi t'avais de l'intelligeoice et un pou de chervellerie, ch'est pas la Tarle qui tou prierions, mais le Moll !»

Si Géraud n'était pas très doué en théologie, il jugea son argument bon malgré tout et se dit qu'il avait dû bien moucher l'Arnould sur ce dernier commentaire.

« Le Moll lui y chait comment qu'on fait avec les molts et chi qu'y chont là poul nous bouffer tout vifs ch'est pach'qu'on leul a poinct laiché l'malmot. Ch'est lui qu'Le Moll y volt, ch'est chûr !»

« Ben si qu’t’es si malin, peau d’zob, » cria Arnould, « envoie-z-y leur l’gamin, eh, merdaille ! Si qu’tu croyes qu’c’est ça qui va les faire partir, vas-y donc ! balance-leur l’Justin, messire l’courageux ! L’a pus rien à perd’, l’étions déjà morre, vu qu’tu l’as tudé avec supplice. »

« Mais j'avions cru qu'ch'étais un rutin mangeur de couilles bleues ! J'savois poinct qu'il était javec nous ! Eh pis cha ch'rait pôs jarrivé chi qu'tu m'av... mais oui, là qu'j'y penche, t'as bin voulu l'y tuder auchi le bon Giraud. A ch'est toujouls comme cha javec les genche. Que tu es bon z-et généleux avec eux et que eux ils te tudont dans ton dos. Pitêt que le Moll y ch'ra d'accold pour plendle un vieux glincheux javec le môme, hein...»

Levant légèrement sa Suzanne et ayant désormais l'oeil droit presque complètement exorbité, ce qui lui donnait une mine affreuse, Géraud était à présent tourné vers l'Arnould avec un air mauvais. Il se savait à portée pour frapper et savait son vieil ennemi, au contraire, trop loin pour faire de même. Les zombies qui approchaient, Géraud les avait déjà oubliés.

Alors que Géraud levait sa Chuzanne avec la ferme intention de tuer Arnould, une main de zombie lui attrapa le poignet, et une autre lui griffa la joue avec des ongles affreusement sales. Il n'eut le temps que de dévier la tête du mort-vivant avec sa main libre avant que celui-ci ne lui morde le cou. Les mâchoires claquèrent dans le vent. Il donna un coup de pied à son agresseur pour le repousser, mais la main du zombie resta fermement agrippée à son bras.

Robert s'écria "ce sont des gârs d'Husselype ! L'autre j'l'reconnois ! C'est un d'ceux qui causera du grabuge l'année dernière ! Y sont deviendus tous morts !"

Géraud n'eut pas le temps de se débattre qu'il se retrouvait à nouveau libre. D'un maitre coup de sa vouge, Marec le forgeron avait tranché le bras de l'immonde mort vivant. Ce dernier considéra son moignon un peu bêtement ce qui permit à Marec de lui envoyer un nouveau coup de vouge bien placé. Cette attaque soudaine avait permit à Géraud de se dégager et de se remettre face aux hideux revenants.

De son côté, Arnould voyait un de ces husselypiens du démon se diriger vers lui en bavant. Dennis Grandegueule vint se poster à ses côtés, pour l'aider à le recevoir, un brandon allumé dans une main, son vide poisson dans l'autre. (HRP : si Morghur veut bien revenir, il est le bienvenu pour jouer son personnage )

Un peu rassuré par le coude-à-coude avec Dennis, qui lui paraissait encore peu suspect de s’adonner à la sorcellerie, Arnould glissa son maillet dans sa ceinture, tira une flèche de son carquois et l’encocha à la corde de son arc, prêt à en percer le premier revenant qui s’approchait de sa personne. Il était bien décidé à éviter l'affrontement direct s'il le pouvait. Ne disait-on pas que la noire magie des blessures causées par les morts-vivants pouvait abattre un homme dans la force de l'âge en quelques jours d'affreuse agonie ?

« Promizoulin ! » beugla-t-il pour se donner du courage. « Finissons-en avec ceusses-là ! »

" Tata Yoyo ! " Hurla à son tour Raoul qui, pendant un temps, avait crus voir des gobelins parlants un étrange dialecte (Mais il pouvait se tromper après tout...).

Il aperçu alors un affreux mort-vivant desséché par le froid se faufilant par la droite de ses compagnons, eux-mêmes trop occupés à se battre pour le voir. Toujours en hurlant, son poignard en l'air, il fondit sur le cadavre ambulant qui tendit les mains vers lui.
Le forestier planta son couteau en plein dans la bouche grande ouverte du monstre qui, en échange, referma ses doigts osseux mais puissant autour de sa gorge. Raoul se sentis suffoquer, d'un mouvement puissant il parvint à dévisser la tête de la créature qui roula au sol, le poignard toujours en bouche, mais le corps de la créature ne s'immobilisait pas et continuait de l'étreindre.
De plus en plus incapable de résister, Raoul usa de ses dernières forces pour assener des coups de poings dans le torse du zombi qui ne lâchait pas prise pour autant...

"Ya l'Raoul qui va crever !" fit Chausson

Le bastonnien avait du mal a se dépêtrer du mort vivant étêté qui lui serrait le cou. Il avait beau marteler le corps hideux de coup de pieds, il avait besoin d'aide pour se sortir de ce mauvais pas.

Chausson du parer l'attaque d'un autre cadavre avec sa vouge, il recula, en direction de Marec, à deux, ils pourraient occire la bête plus facilement. Géraud, le plus proche de Raoul, ne bougeait pas, semblant se réjouir de la situation. Arnould était accoudé à Dennis, et essayer de viser le revenant qui étranglait Raoul, il fallait agir et vite.